Introduction
Malgré les politiques d’égalité et les campagnes de sensibilisation, les normes viriles en entreprise continuent de structurer de nombreux comportements, rapports hiérarchiques et styles de management. Ces normes, souvent invisibles, influencent encore la manière dont on conçoit la performance, le leadership ou même la communication au sein des collectifs de travail.
Comprendre les normes viriles au travail
Les normes viriles désignent un ensemble d’attitudes, de postures et de représentations historiquement associées à la masculinité dominante. Dans l’entreprise, elles se traduisent par :
- une valorisation de la compétition, de la disponibilité totale, du contrôle émotionnel ;
- une méfiance à l’égard de l’expression de la vulnérabilité ;
- une hiérarchisation implicite entre des « qualités masculines » (prise de décision, rationalité, force) et des « qualités féminines » (empathie, écoute, prudence) ;
- la tendance à bannir ou minimiser les émotions, perçues comme contre-productives ou non-professionnelles.
Ces stéréotypes masculins au travail ne touchent pas uniquement les femmes : ils impactent aussi les hommes qui ne s’y conforment pas, les personnes LGBTQIA+, et tous ceux et celles qui aspirent à d’autres formes de relation au travail.
Un leadership encore largement façonné par la virilité
Performant·e à quel prix ? Les effets de la norme
Dans de nombreux secteurs (industrie, tech, finance…), le leadership reste associé à des codes virils : autorité affirmée, rythme de travail intense, prise de parole assurée, compétitivité, disponibilité permanente.
Cela contribue à maintenir une culture d’entreprise peu inclusive, où les personnes ne se reconnaissant pas dans ces codes, sont perçues comme moins aptes à diriger ou à évoluer.
Ces mécanismes peuvent également favoriser des formes de sexisme ordinaire, voire des comportements d’exclusion ou de domination, souvent banalisés au nom de la culture du résultat.
Égalité au travail : En finir avec les Violences sexistes et sexuelles
La persistance des normes viriles en entreprise produit des effets délétères :
- Sur les individus : surcharge mentale, pression à la surproductivité, isolement, autocensure.
- Sur l’égalité professionnelle : ralentissement des carrières féminines, biais dans le recrutement et l’évaluation. Lire l’article : le sexisme en milieu professionnel: un obstacle à l’égalité des chances
- Sur la culture organisationnelle : faible prise en compte du bien-être au travail, minimisation des signaux faibles (burn-out, discrimination, conflits).
Ces effets sont souvent masqués par une rhétorique de la neutralité (« on ne fait pas de différence »), alors même que la norme dominante reste genrée.
Comment déconstruire ces normes dans les organisations ?
La déconstruction des stéréotypes de genre au travail passe par plusieurs leviers :
1. Former et sensibiliser
Proposer des formations sur le genre, le sexisme ordinaire, les stéréotypes professionnels. Cela permet d’identifier les normes implicites et de comprendre leur impact.
2. Favoriser des modèles de leadership pluriels
Valoriser des styles de management différents (coopératif, participatif, horizontal), portés par des profils divers.
3. Réinterroger les critères de performance
Passer d’une culture du présentéisme à une culture du résultat responsable, intégrant la qualité relationnelle, la créativité ou la collaboration.
4. Encourager la parole et le droit à l’émotion
Créer un environnement où les émotions, l’écoute et la vulnérabilité sont perçues comme des compétences et non comme des faiblesses.
5. Agir sur l’environnement RH
Revoir les critères de recrutement, d’évaluation et de promotion pour y débusquer les biais sexistes ou virilistes.
Vers une entreprise plus inclusive et équitable
Remettre en question les normes viriles dans le monde du travail, ce n’est pas fragiliser l’entreprise : c’est au contraire la rendre plus durable, plus humaine et plus performante.
En intégrant la diversité des modes d’engagement, des parcours, des styles relationnels, l’entreprise devient capable de mieux répondre aux défis contemporains : innovation, transversalité, sens au travail, bien-être collectif.
Ce que cela suppose : une démarche engagée
Cela implique une volonté politique de la direction, un engagement des RH et un accompagnement par des acteur·rices formé·es à ces questions. De plus en plus d’organisations choisissent de se faire accompagner sur ces enjeux en incluant dans leur plan d’action :
- des diagnostics genrés de leur culture managériale,
- des formations sur les comportements sexistes,
- des espaces de parole sur les rapports au travail, à la norme, à la réussite.
Conclusion
Oui, les normes viriles persistent en entreprise — mais elles peuvent être déconstruites. Cela demande de la lucidité, de la volonté, et surtout, une transformation en profondeur des représentations collectives.
Mettre en cause ces normes, c’est ouvrir la voie à un monde professionnel plus juste, plus souple et plus humain.
Pour aller plus loin : Virilité et accès aux postes de pouvoir dans les organisations
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Les violences sexistes et sexuelles en milieu professionnel :